25 ordonnances sont parues ce jour au JO (26 mars 2020). Ci-joint le dossier de présentation des principales mesures : 

https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2020/03/dossier_de_presse_-_presentation_des_25_premieres_ordonnances_-_25.03.2020.pdf

 

Plusieurs d’entre elles portent des dispositions relatives au droit immobilier et sont susceptibles de vous intéresser.

 

-        Copropriété -

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041755577&categorieLien=id

Titre II : DISPOSITIONS EN MATIÈRE DE COPROPRIÉTÉ - Article 22

« Par dérogation aux dispositions de l'article 1102 et du deuxième alinéa de l'article 1214 du code civil et de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le contrat de syndic qui expire ou a expiré pendant la période définie à l'article 1er [confinement sanitaire Ndlr] est renouvelé dans les mêmes termes jusqu'à la prise d'effet du nouveau contrat du syndic désigné par la prochaine assemblée générale des copropriétaires. Cette prise d'effet intervient, au plus tard six mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire mentionné à l'article 1er.

Les dispositions du précédent alinéa ne sont pas applicables lorsque l'assemblée générale des copropriétaires a désigné, avant la publication de la présente ordonnance, un syndic dont le contrat prend effet à compter du 12 mars 2020. »

-        Loyers et trêve hivernale -

L'ordonnance n° 2020-331 du 25 mars 2020 relative au prolongement de la trêve hivernale jusqu’au 31 mai 2020 :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041756148&categorieLien=id

Ordonnance relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels et commerciaux des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l’épidémie de COVID-19 :

 https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=EFB73DB8FA515A6C634BD7834DFF5123.tplgfr41s_3?cidTexte=JORFTEXT000041755842&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id&idJO=JORFCONT000041755510

Suspension des loyers commerciaux et professionnels - Article 4 de cette ordonnance :

« Les personnes mentionnées à l'article 1er (Les TPE - Ndlr) ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d'astreinte, d'exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d'activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce.

Les dispositions ci-dessus s'appliquent aux loyers et charges locatives dont l'échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l'expiration d'un délai de deux mois après la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 précitée. »

Actualités

Copropriété : Adoption au Sénat du projet de la loi relatif à l’habitat dégradé – Mesures affectant directement le syndic

Le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement a été adopté au Sénat. Un certain nombre de mesures concernent les copropriétés, et d’autres plus directement les syndics. Ainsi :

- Le président du tribunal judiciaire pourrait imputer tout ou partie des frais de l’administration provisoire au syndic « laxiste » qui n’aurait pas anticipé la situation de difficulté de la copropriété en faisant désigner un mandataire ad’hoc.

- A l’instar de l’état daté, plafonnement par décret des frais de relance du syndic au sein de l’article 10-1 de la loi de 1965.

- Création et agrément préfectoral d’un syndic d’intérêt collectif, compétent pour gérer les copropriétés pour lesquelles un mandataire ad hoc a été désigné (sur le fondement de l’article 29-1 A). Il pourrait également, à la demande d’un administrateur provisoire l’assister dans ses fonctions de gestion de l’article 29-1 de la loi de 1965 (une forme de sous-traitance ?).

- Création d’un appel de fonds type établi selon un modèle unique fixé par décret (de la norme, encore de la norme...).

- Obligation pour le syndic de donner sans délai au président du CS (dès sa désignation) ou, à défaut, à un membre du CS désigné à cet effet par l’assemblée, un accès numérique aux comptes bancaires séparés de la copropriété, permettant de consulter, en lecture seule, les comptes et les opérations bancaires du SDC.

- Obligation pour le syndic de convoquer une assemblée dans un délai de deux mois lorsque le président du conseil syndical en fait la demande. À défaut, le président du conseil syndical est habilité à la convoquer.

- Retour de l’ancien système de l’article 25-1 permettant de tenir une seconde assemblée générale à la majorité de l’article 24 si elle est convoquée dans un délai de trois mois, pour les seuls travaux de l’article 25f (les travaux d'économies d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre).

Ces mesures laissent toujours entrevoir une certaine défiance à l'égard de la profession de syndic. A suivre...

Locations touristiques de courte durée et contraintes administratives

Les communes n’ont de cesse de tenter de juguler l’expansion des locations de tourisme (notamment dans les copropriétés) au détriment des locations classiques à usage de résidence principale. T

outefois les juridictions administratives veillent à éviter les dérives et excès de réglementation. Pour exemple, le Tribunal administratif de Nice a partiellement annulé une délibération de la ville de Nice dans une décision du 31 janvier 2024 n°2104077. Cette délibération imposait aux propriétaires souhaitant faire de la location saisonnière dite Airbnb de justifier que leur demande de changement d’usage était autorisée dans leur copropriété et de joindre l’extrait du règlement de copropriété en attestant (et à défautl’accord de la copropriété).

Le Tribunal administratif de Nancy avait lui aussi précédemment suivi ce raisonnement dans un jugement du 25 avril 2023 en annulant l’article 8 du règlement municipal de la commune de Strasbourg. Pour le tribunal Lorrain la mention de ce règlement imposant « que le demandeur bénéficie de l’autorisation écrite de la copropriété » porte une atteinte disproportionnée à son droit de propriété.

La cour administrative de Bordeaux quant à elle a pu juger dans un arrêt du 30 janvier 2024 que le mécanisme de compensation institué à Bordeaux « s’il est de nature à rendre plus difficile la location de courte durée dans le cœur historique de Bordeaux (…) contribue à maintenir le caractère résidentiel du centre-ville, davantage sollicité pour la location de courte durée ».

Rappelons que parallèlement la Cour de cassation a récemment relâché la pression sur les copropriétaires dans un arrêt du 25 janvier 2024.

La proposition de loi dite LE MEUR visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif (adoptée par l'Assemblée nationale le 29 janvier dernier) devrait également apporter sa contribution à l'édifice. 

 

Copropriété : La location de courte durée n’a pas forcément un caractère commercial

La troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 25 janvier 2024, n°22-21.455, vient de rendre une décision faisant évoluer la jurisprudence sur les conséquences de la pratique de la location meublée touristique de courte durée dans un immeuble à destination dite d’habitation bourgeoise.

En présence d’une telle clause, la nature juridique de l’activité, civile ou commerciale selon les cas, est évidemment au cœur des débats afin de déterminer si elle peut être exercée au sein de la copropriété.

Sur ce point, la Haute Cour vient de confirmer l’analyse des juges du fond (ici la Cour d’appel de Chambéry) en retenant : « que l’activité exercée dans l’immeuble n’était accompagnée d’aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures ne revêtant pas le caractère d’un service para-hôtelier, la cour d’appel en a exactement déduit que cette activité n’était pas de nature commerciale ».

La position adoptée par la Cour de cassation nous rappelle ici celle récemment adoptée par le tribunal judiciaire de Nice (cf. notre actualité du 22/09/2023).

A titre surabondant, le Cour en profite pour rappeler que le régime fiscal applicable aux revenus perçus dans le cadre de ces locations est inopérant pour emporter la qualification commerciale.

Copropriété/Transaction : Opposabilité du modificatif non publié

Un acquéreur qui est informé dans son acte d’achat des restrictions votées par l’assemblée générale avant son acquisition peut-il opposer à la copropriété la non-publication du modificatif au fichier immobilier ?

En l’espèce aux termes d’une assemblée générale les copropriétaires ont décidé d’interdire l’exploitation dans les locaux commerciaux des activités à usage de bar, restaurants, boîtes de nuit ou toute activité de ce type ; or ce modificatif au règlement de copropriété n’avait fait l’objet d’aucune publication à la date d’acquisition. 

La Cour de cassation, dans un arrêt du 12 octobre 2023 n°22-17918, affirme que la SCI qui avait signé l’acte de vente en ayant connaissance de la restriction apportée à la destination de son lot, l’avait ainsi ratifiée. La cour d’appel a pu en déduire que sa demande d’autorisation de travaux visant à permettre une activité de restauration interdite devait être rejetée.

Transaction : Nullité de deux mandats de vente avec le même numéro ?

On le sait la jurisprudence est très rigoureuse sur le formalisme du mandat Hoguet et de sa numérotation au registre. Dans un arrêt empreint d’un étonnant pragmatisme, la cour d’appel de Lyon le 14 septembre 2023 n°21-00647, a jugé que deux mandats conclus à quelques jours d’intervalle sur un même bien et portant le même numéro ne sont pas nécessairement nuls.

Dans cette espèce les magistrats relèvent que les deux mandats sont conclus à quelques jours d’intervalle sur le même bien et aux mêmes conditions, excepté une baisse de prix.

La cour fait droit à l’argumentation de l’agence ERA considérant que le second mandat aurait pu être conclu sous forme d’un avenant dont l’enregistrement n’est nullement obligatoire en l’état des textes et de la jurisprudence.

C’est pourquoi, en l’absence de toute irrégularité qui justifierait l’annulation de l’un quelconque des mandats, la demande de nullité est rejetée et l’agence peut prétendre à ses honoraires.

Il n'est pas certain que la Cour de cassation suivrait la même analyse, cette décision a toutefois le mérite d'exister et d'être pleine de bon sens.

Nous suivre