La loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat est parue au Journal Officiel du 17 août 2022. Ce texte prévoit différentes mesures, notamment dans le secteur de l’immobilier.

 -        Augmentation de l’APL

 Ainsi, afin de couvrir les hausses de loyer, l'aide personnalisée au logement (APL) est revalorisée de 3,5% avec effet rétroactif au 1er juillet 2022 (revalorisation qui était à l'origine prévue au 1er octobre 2022 et au 1er janvier 2023). 

  -        Plafonnement de l’indexation à l’IRL

Un bouclier pour plafonner l’indexation des loyers d’habitation est également mis en place pendant un an, jusqu'au 30 juin 2023. Le texte (article 12) dispose ainsi « pour la fixation des indices de référence des loyers entre le troisième trimestre de l'année 2022 et le deuxième trimestre de l'année 2023, la variation en glissement annuel de l'indice de référence des loyers ne peut excéder 3,5 % ».

Précisons que les députés ont abaissé ce plafond à 2,5% pour les loyers en outre-mer et institué un dispositif particulier et variable pour la Corse (après consultation pour avis de l'assemblée de Corse).

-        Limitation du complément de loyer pour les logements inconfortables

Dans le cadre du dispositif d’encadrement des loyers, cette loi (article 13) interdit au bailleur d’appliquer un complément de loyer lorsque le logement présente une ou plusieurs des caractéristiques suivantes : « des sanitaires sur le palier, des signes d'humidité sur certains murs, un niveau de performance énergétique de classe F ou de classe G au sens de l'article L. 173-1-1 du code de la construction et de l'habitation, des fenêtres laissant anormalement passer l'air hors grille de ventilation, un vis-à-vis à moins de dix mètres, des infiltrations ou des inondations provenant de l'extérieur du logement, des problèmes d'évacuation d'eau au cours des trois derniers mois, une installation électrique dégradée ou une mauvaise exposition de la pièce principale. »

Précisons que cette mesure ne s’applique pas aux baux en cours, et que certains critères sont pour le moins sujet à interprétation…

-        Bail commercial & plafonnement de l’ILC pour les PME

 La loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat (article 14) prévoit également que la variation annuelle de l'indice des loyers commerciaux (ILC), prise en compte pour la révision du loyer applicable aux petites et moyennes entreprises ne peut excéder 3,5% pour les trimestres compris entre le deuxième trimestre 2022 et le premier trimestre 2023. Le plafonnement de la variation annuelle est définitivement acquis et la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision postérieure ne peut prendre en compte la part de variation de l'indice des loyers commerciaux supérieure à 3,5 % sur cette même période.

Pour mémoire le dernier ILC publié (fin juin 2022), désormais corrigé du chiffre d’affaires dans le commerce de détail, s’établissait à 120,61, soit une augmentation de 3,32 % sur un an (inférieure à ce plafond).

Sur la partie immobilière, le texte semble avoir été rédigé à la hâte, de manière parfois imprécise et/ou confuse ; du contentieux en perspective assurément...

A l'occasion du pourvoi formé contre un arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes, qui avait rejeté la demande en paiement d'une clause pénale d’un agent immobilier suite au refus de son mandant de réaliser la vente avec la personne qu'il lui avait présentée, l’intermédiaire immobilier a demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel deux questions prioritaires de constitutionnalité ainsi rédigées :

« L'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 porte-t-il atteinte à la liberté d'entreprendre et à la liberté contractuelle en interdisant la rémunération de l'intermédiaire tant que l'opération projetée n'est pas réalisée, même lorsque c'est le mandant qui refuse sans justification de conclure la vente objet du contrat d'entremise ?

L'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, tel qu'interprété par la Cour de cassation, porte-t-il atteinte au principe de responsabilité en ce qu'il exclut que soit regardé comme fautif le mandant qui, ayant confié à un intermédiaire la recherche d'un vendeur ou d'un acheteur, refuse sans aucune raison de conclure la vente projetée ? »

La Cour de cassation dans un arrêt du 7 juillet 2022 n°21-25661 écarte ces demandes de QPC et refuse de transmettre ces questions au Conseil constitutionnel.

Pour elle la première question ne présente pas un caractère sérieux en ce que l'interdiction pour l'agent immobilier de percevoir une quelconque rémunération en l'absence de conclusion effective de l'opération projetée, quelle qu'en soit la raison, est fondée sur le motif d'intérêt général tenant à la nécessaire réglementation des pratiques des professionnels visés à l'article 1er de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 afin d'assurer l'information, la protection et la liberté contractuelle de leurs clients.

La seconde question ne présente pas non plus de caractère sérieux selon la Cour en ce que le contrat conclu entre l'agent immobilier et son client étant, sauf disposition expresse contraire, un contrat d'entremise. L’agent ne dispose pas du pouvoir d'engager son client, de sorte que celui-ci est libre de conclure ou non l'opération, et son seul refus, ne peut, par nature, être constitutif de la faute susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard de son mandataire.

La cour d’appel d’Aix en Provence, dans un arrêt du 23 juin 2022 n°21-10914, relève que le lot de copropriété (loft d’exception) était loué sur Airbnb selon un prix de location par nuitée et non en fonction d’une saison touristique.

La cour en déduit donc qu’il ne s’agit pas d’une location saisonnière. En l’espèce, le syndicat des copropriétaires produisait un constat dressé en février qui démontrait que l’appartement était loué également en hiver. La location s’adressait donc à des occupants temporaires et fréquents.

Pour la cour d’appel, le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, est incompatible avec la clause d’habitation bourgeoise d’un règlement de copropriété, que cette stipulation d'habitation bourgeoise soit stricte ou non.

La location à la nuitée, toute l’année, semble donc constituer une circonstance aggravante que les syndicats de copropriétaires ne manqueront certainement plus de mettre en avant dans leurs actions judiciaires.

En application de la loi dite climat et résilience du 22 août 2021, lorsque le propriétaire d'un immeuble existant procède à l'isolation thermique par l'extérieur de son bâtiment, il bénéficie d'un droit de surplomb sur le fonds voisin et, le cas échéant, d'un droit d'accès temporaire à ce fonds, sous réserve de l'opposition du propriétaire du fonds à surplomber.

Un décret n°2022-926 du 23 juin 2022 (J.O du 24) précise les modalités de mise en œuvre de ces droits, notamment les documents qui doivent être notifiés au propriétaire du fonds à surplomber, les modalités de cette notification et la procédure d'opposition.

Le texte prévoit notamment que lorsque le fonds à surplomber est un immeuble soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, le syndicat des copropriétaires peut s’y opposer par décision motivée.

Le syndic doit pour cela inscrire à l'ordre du jour d'une assemblée générale des copropriétaires la question de la saisine du juge en opposition à l'exercice de ces droits dans les conditions du nouvel article R.113-22 du CCH.

On regrettera peut-être, pour une certaine cohérence, que ce texte ne figure pas dans le décret du 17 mars 1967.

La Cour de cassation, dans un arrêt de censure du 15 juin 2022 n°20-22047, rappelle une nouvelle fois que l’agent immobilier ne peut prétendre à rémunération ou indemnisation lorsqu’il détient un mandat d’entremise, quand bien même il s’agirait d’un mandat exclusif ! Dans cette affaire la vendeuse avait confié à l’agence un mandat exclusif de vente d'un appartement.

Par la suite l'agent immobilier l'a informée qu'il avait trouvé un acquéreur au prix stipulé au mandat. Sans réaction, l’agent immobilier lui adressait alors une mise en demeure de signer une promesse conforme au mandat, la vendeuse lui indiquait alors en retour qu'elle ne souhaitait plus vendre l'appartement, s’en est suivi une procédure judiciaire.

La Cour de cassation reprend ici une solution désormais établie, le mandat d'entremise donné à l’agent immobilier ne lui permet pas d'engager son mandant pour l'opération envisagée à moins qu'une clause ne l'y autorise expressément, de sorte que le refus du mandant de réaliser la vente avec une personne qui lui est présentée par son mandataire ne constitue pas une faute pouvant justifier sa condamnation au paiement de dommages-intérêts…

La Cour de cassation, dans un arrêt de censure du 1er juin 2022 n°21-16232, juge que la cession d’une partie commune spéciale doit être soumise aux votes des seuls copropriétaires disposant de tantièmes de propriété sur cette partie commune.

En effet, la Haute Cour prend la peine de viser notamment l’article 4 de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose que « Les parties communes sont l'objet d'une propriété indivise entre l'ensemble des copropriétaires ou certains d'entre eux seulement ; selon le cas, elles sont générales ou spéciales. » En l’espèce il s’agissait de la cession d’un couloir commun dans un bâtiment.

La cour d’appel d’Aix en Provence, dans un arrêt du 17 mars 2022 n°21-101165, censure les magistrats de première instance (Fréjus) qui avaient cru pouvoir valider un congé fondé sur l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 et avaient ordonné l’expulsion de la locataire.

Dans cette espèce le bail était expressément exclu du régime juridique de la loi de 1989, puisque consenti à une personne morale (conformément à la jurisprudence constante de la Cour de cassation). Dans ces conditions les magistrats de la cour considèrent que le congé pour vente délivré ne pouvait pas se contenter de viser l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989, régime inapplicable en l’espèce.

Ce congé aurait dû viser l’article 1736 du Code civil et les termes de la clause du contrat relative à la durée du bail et aux modalités pour donner congé.

La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 16 février 2022 n°20-2337 que l'acquéreur professionnel ne peut pas profiter du bénéfice du délai de rétractation prévu par l’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation (CCH).

Pour mémoire l'alinéa 1er de ce texte dispose : "Pour tout acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, la souscription de parts donnant vocation à l'attribution en jouissance ou en propriété d'immeubles d'habitation ou la vente d'immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l'acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l'acte."

Dans cette espèce les magistrats ont relevé que l’acquéreur avait mentionné dans l'avant-contrat sa profession de promoteur, qu'il s'était ensuite substitué à la vente une société, dont il était le gérant et dont l'activité était celle d'un marchand de biens, et qu'il recherchait des bureaux pour y installer son entreprise.

La Cour de cassation rappelle dans un arrêt de censure du 19 janvier 2022 n°20-13619 que l’agent immobilier peut toujours obtenir l’indemnisation de la perte de ses honoraires par l’octroi de dommages-intérêts de la part de l’acquéreur fautif dans la non-réalisation de la vente. Cet arrêt précise que la responsabilité délictuelle étant d’ordre public, l’application des articles 1240 et 1241 du Code civil (anciens 1382 et 1383) ne peut être limitée ou neutralisée contractuellement par anticipation dans la promesse.

La Cour d’appel de REIMS, censurée, avait cru pouvoir juger et déduire des promesses signées que l’indemnisation du mandataire était subordonnée à ce que le vendeur ait lui-même agi judiciairement avec succès contre l’acquéreur, aux fins de déclarer la condition suspensive du prêt réalisée.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 21 avril 2022 n°20-20866, censure le jugement de première instance qui avait cru pouvoir condamner un copropriétaire et ordonner l’exigibilité des provisions non encore échues en application de l’article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965. Pour la Haute Cour le copropriétaire avait réglé des acomptes dans le délai de 30 jours suivant la réception de la mise en demeure prévue par cet article 19-2.

Quand bien même il ne justifiait pas avoir soldé sa dette, puisqu'il restait débiteur de la somme de 2 064,60€ au titre des charges arriérées, le juge aurait dû rechercher si la mise en demeure n'avait pas « été fructueuse », au sens de l’article 19-2 !

Voici une décision qui risque de mettre un coup d’arrêt à la portée de cette disposition, dès lors que le copropriétaire débiteur aura versé une somme quelconque dans les 30 jours suivant la mise en demeure que lui aura adressée le syndicat des copropriétaires…

Le Décret n° 2022-780 du 4 mai 2022relatif à l'audit énergétique mentionné à l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation est paru au JO du 5 mai 2022. Il précise les conditions et la capacité des professionnels pouvant réaliser un audit énergétique. Ce décret est complété par l’arrêté du même jour qui fixe en détail le contenu de l’audit énergétique. Il précise également que cet audit a une durée de validité de cinq années.

L'auditeur a pour missions de dresser un état des lieux des performances énergétiques initiales du logement, en identifiant notamment les déperditions thermiques, d'établir un diagnostic des modes constructifs, des principales caractéristiques architecturales et thermiques, des équipements énergétiques ainsi que des éventuelles pathologies du bâtiment et d'effectuer des propositions de travaux permettant d'améliorer le confort thermique et la qualité d'air et de parvenir à une rénovation performante. Le texte précise que l’auditeur doit effectuer au moins une visite du logement, en présence du propriétaire ou de son mandataire, et rédiger un rapport de synthèse qui reprend les éléments précités. Lorsque les contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ou le coût des travaux font obstacle à l'atteinte de la classe B au sens de l'article L. 173-1-1 du CCH, l'auditeur doit en justifier dans son rapport. 

L'auditeur doit en outre conserver l'ensemble des audits qu'il réalise sous la forme de fichiers informatiques standardisés dont les caractéristiques sont fixées également par l’arrêté du 4 mai 2022. L'auditeur doit tenir les audits énergétiques qu'il réalise à la disposition des propriétaires successifs des logements, pendant leur durée de validité. A leur demande, il leur délivre des informations sur les propositions de travaux présentées et, le cas échéant, atteste de la réalisation de scénarios de travaux présentés dans les audits, sans qu'il soit nécessaire pour le propriétaire intéressé d'entreprendre la réalisation d'un nouvel audit. L’ensemble de ces conditions sont applicables pour les logements qui feront l'objet d'une promesse de vente ou à défaut de promesse, d'un acte de vente :

A compter du 1er septembre 2022, pour les logements qui appartiennent aux classes F et G (au lieu du 1er janvier 2022 initialement) ;

A compter du 1er janvier 2025, pour ceux qui appartiennent à la classe E; 

A compter du 1er janvier 2034, pour ceux qui appartiennent à la classe D.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 8 décembre 2021 n°20-21841 revient sur la règle dite du contrepartisme de l’article 1596 du Code civil qui interdit en principe à l’agence mandatée d’acquérir les biens qu’elle est chargée de vendre, par elle-même ou par personnes interposées. Dans cette espèce la cour d’appel d’Aix en Provence, confirmée par la Cour de cassation, relève que la SCI venderesse connaissait le lien de parenté entre les acquéreurs et le gérant de l'agence immobilière qu'elle avait mandatée pour vendre son bien, lien qui figurait dans la promesse de vente.

En outre pour les magistrats, les parents du gérant de l’agence avaient acheté ledit bien pour constituer un complément de retraite, ils en avaient encaissé les loyers et géré eux-mêmes les difficultés rencontrées avec la locataire, notamment les impayés répétitifs. Pour les magistrats il n'y avait donc pas eu interposition et la nullité de la vente ne devait pas être encourue.

Pour mémoire, l’article 9 al. 1° du décret 28 août 2015 fixant le code de déontologie des professionnels de l’immobilier prévoit notamment que les agences s’engagent à ne pas acquérir, en partie ou en totalité, ni faire acquérir par un proche ou un organisme quelconque dans lequel elles détiendraient une participation, un bien immobilier pour lequel un mandat leur a été confié, sauf à informer leur mandant de leur projet.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 8 décembre 2021 n°20-21841 revient sur la règle dite du contrepartisme de l’article 1596 du Code civil qui interdit en principe à l’agence mandatée d’acquérir les biens qu’elle est chargée de vendre, par elle-même ou par personnes interposées. Dans cette espèce la cour d’appel d’Aix en Provence, confirmée par la Cour de cassation, relève que la SCI venderesse connaissait le lien de parenté entre les acquéreurs et le gérant de l'agence immobilière qu'elle avait mandatée pour vendre son bien, lien qui figurait dans la promesse de vente.

En outre pour les magistrats, les parents du gérant de l’agence avaient acheté ledit bien pour constituer un complément de retraite, ils en avaient encaissé les loyers et géré eux-mêmes les difficultés rencontrées avec la locataire, notamment les impayés répétitifs. Pour les magistrats il n'y avait donc pas eu interposition et la nullité de la vente ne devait pas être encourue.

Pour mémoire, l’article 9 al. 1° du décret 28 août 2015 fixant le code de déontologie des professionnels de l’immobilier prévoit notamment que les agences s’engagent à ne pas acquérir, en partie ou en totalité, ni faire acquérir par un proche ou un organisme quelconque dans lequel elles détiendraient une participation, un bien immobilier pour lequel un mandat leur a été confié, sauf à informer leur mandant de leur projet.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 19 janvier 2022 n°20-19951, donne raison à un vendeur qui a agi en dommages intérêts contre son acquéreur. En effet, dans le cadre de la vente d’un immeuble occupé, l’acheteur avait négocié le départ du locataire qui occupait les lieux (pourtant après la signature de la promesse de vente).

Pour les magistrats, la dissimulation de la libération des lieux par l'occupant en titre, de nature à augmenter de façon significative la valeur du bien vendu, manifestait l'absence de loyauté, de bonne foi et de sincérité de l'acquéreur, ouvrant droit à dommages-intérêts pour le vendeur (300 000€).

Moralité, en pareille circonstance, attendre la signature de l’acte authentique avant de négocier avec le locataire…

Actualités

Copropriété : Adoption au Sénat du projet de la loi relatif à l’habitat dégradé – Mesures affectant directement le syndic

Le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement a été adopté au Sénat. Un certain nombre de mesures concernent les copropriétés, et d’autres plus directement les syndics. Ainsi :

- Le président du tribunal judiciaire pourrait imputer tout ou partie des frais de l’administration provisoire au syndic « laxiste » qui n’aurait pas anticipé la situation de difficulté de la copropriété en faisant désigner un mandataire ad’hoc.

- A l’instar de l’état daté, plafonnement par décret des frais de relance du syndic au sein de l’article 10-1 de la loi de 1965.

- Création et agrément préfectoral d’un syndic d’intérêt collectif, compétent pour gérer les copropriétés pour lesquelles un mandataire ad hoc a été désigné (sur le fondement de l’article 29-1 A). Il pourrait également, à la demande d’un administrateur provisoire l’assister dans ses fonctions de gestion de l’article 29-1 de la loi de 1965 (une forme de sous-traitance ?).

- Création d’un appel de fonds type établi selon un modèle unique fixé par décret (de la norme, encore de la norme...).

- Obligation pour le syndic de donner sans délai au président du CS (dès sa désignation) ou, à défaut, à un membre du CS désigné à cet effet par l’assemblée, un accès numérique aux comptes bancaires séparés de la copropriété, permettant de consulter, en lecture seule, les comptes et les opérations bancaires du SDC.

- Obligation pour le syndic de convoquer une assemblée dans un délai de deux mois lorsque le président du conseil syndical en fait la demande. À défaut, le président du conseil syndical est habilité à la convoquer.

- Retour de l’ancien système de l’article 25-1 permettant de tenir une seconde assemblée générale à la majorité de l’article 24 si elle est convoquée dans un délai de trois mois, pour les seuls travaux de l’article 25f (les travaux d'économies d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre).

Ces mesures laissent toujours entrevoir une certaine défiance à l'égard de la profession de syndic. A suivre...

Locations touristiques de courte durée et contraintes administratives

Les communes n’ont de cesse de tenter de juguler l’expansion des locations de tourisme (notamment dans les copropriétés) au détriment des locations classiques à usage de résidence principale. T

outefois les juridictions administratives veillent à éviter les dérives et excès de réglementation. Pour exemple, le Tribunal administratif de Nice a partiellement annulé une délibération de la ville de Nice dans une décision du 31 janvier 2024 n°2104077. Cette délibération imposait aux propriétaires souhaitant faire de la location saisonnière dite Airbnb de justifier que leur demande de changement d’usage était autorisée dans leur copropriété et de joindre l’extrait du règlement de copropriété en attestant (et à défautl’accord de la copropriété).

Le Tribunal administratif de Nancy avait lui aussi précédemment suivi ce raisonnement dans un jugement du 25 avril 2023 en annulant l’article 8 du règlement municipal de la commune de Strasbourg. Pour le tribunal Lorrain la mention de ce règlement imposant « que le demandeur bénéficie de l’autorisation écrite de la copropriété » porte une atteinte disproportionnée à son droit de propriété.

La cour administrative de Bordeaux quant à elle a pu juger dans un arrêt du 30 janvier 2024 que le mécanisme de compensation institué à Bordeaux « s’il est de nature à rendre plus difficile la location de courte durée dans le cœur historique de Bordeaux (…) contribue à maintenir le caractère résidentiel du centre-ville, davantage sollicité pour la location de courte durée ».

Rappelons que parallèlement la Cour de cassation a récemment relâché la pression sur les copropriétaires dans un arrêt du 25 janvier 2024.

La proposition de loi dite LE MEUR visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif (adoptée par l'Assemblée nationale le 29 janvier dernier) devrait également apporter sa contribution à l'édifice. 

 

Copropriété : La location de courte durée n’a pas forcément un caractère commercial

La troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 25 janvier 2024, n°22-21.455, vient de rendre une décision faisant évoluer la jurisprudence sur les conséquences de la pratique de la location meublée touristique de courte durée dans un immeuble à destination dite d’habitation bourgeoise.

En présence d’une telle clause, la nature juridique de l’activité, civile ou commerciale selon les cas, est évidemment au cœur des débats afin de déterminer si elle peut être exercée au sein de la copropriété.

Sur ce point, la Haute Cour vient de confirmer l’analyse des juges du fond (ici la Cour d’appel de Chambéry) en retenant : « que l’activité exercée dans l’immeuble n’était accompagnée d’aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures ne revêtant pas le caractère d’un service para-hôtelier, la cour d’appel en a exactement déduit que cette activité n’était pas de nature commerciale ».

La position adoptée par la Cour de cassation nous rappelle ici celle récemment adoptée par le tribunal judiciaire de Nice (cf. notre actualité du 22/09/2023).

A titre surabondant, le Cour en profite pour rappeler que le régime fiscal applicable aux revenus perçus dans le cadre de ces locations est inopérant pour emporter la qualification commerciale.

Copropriété/Transaction : Opposabilité du modificatif non publié

Un acquéreur qui est informé dans son acte d’achat des restrictions votées par l’assemblée générale avant son acquisition peut-il opposer à la copropriété la non-publication du modificatif au fichier immobilier ?

En l’espèce aux termes d’une assemblée générale les copropriétaires ont décidé d’interdire l’exploitation dans les locaux commerciaux des activités à usage de bar, restaurants, boîtes de nuit ou toute activité de ce type ; or ce modificatif au règlement de copropriété n’avait fait l’objet d’aucune publication à la date d’acquisition. 

La Cour de cassation, dans un arrêt du 12 octobre 2023 n°22-17918, affirme que la SCI qui avait signé l’acte de vente en ayant connaissance de la restriction apportée à la destination de son lot, l’avait ainsi ratifiée. La cour d’appel a pu en déduire que sa demande d’autorisation de travaux visant à permettre une activité de restauration interdite devait être rejetée.

Transaction : Nullité de deux mandats de vente avec le même numéro ?

On le sait la jurisprudence est très rigoureuse sur le formalisme du mandat Hoguet et de sa numérotation au registre. Dans un arrêt empreint d’un étonnant pragmatisme, la cour d’appel de Lyon le 14 septembre 2023 n°21-00647, a jugé que deux mandats conclus à quelques jours d’intervalle sur un même bien et portant le même numéro ne sont pas nécessairement nuls.

Dans cette espèce les magistrats relèvent que les deux mandats sont conclus à quelques jours d’intervalle sur le même bien et aux mêmes conditions, excepté une baisse de prix.

La cour fait droit à l’argumentation de l’agence ERA considérant que le second mandat aurait pu être conclu sous forme d’un avenant dont l’enregistrement n’est nullement obligatoire en l’état des textes et de la jurisprudence.

C’est pourquoi, en l’absence de toute irrégularité qui justifierait l’annulation de l’un quelconque des mandats, la demande de nullité est rejetée et l’agence peut prétendre à ses honoraires.

Il n'est pas certain que la Cour de cassation suivrait la même analyse, cette décision a toutefois le mérite d'exister et d'être pleine de bon sens.

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